Dans une résidence calme du Val-de-Marne, selon le Parisien, les habitants d’un immeuble ont vécu l’indicible : la découverte tardive d’un corps en décomposition dans un appartement envahi par les déchets. Une situation dramatique, révélatrice d’un trouble méconnu : le syndrome de Diogène.
Une odeur insoutenable, des résidents sous le choc
Depuis plusieurs jours, les habitants d’un immeuble d’habitation à L’Haÿ-les-Roses se plaignaient d’une odeur fétide qui gagnait les étages. « C’était irrespirable, une odeur qui prend à la gorge, que l’on n’oublie jamais », raconte Samia, une voisine du palier, encore profondément affectée. « J’ai vomi tellement de fois que j’ai dû être hospitalisée. »
Les premiers soupçons se sont tournés vers un résident discret, un homme âgé d’environ 70 ans qui vivait reclus, sans visite, dans un appartement laissé à l’abandon. Le 2 mai, les pompiers, prévenus par plusieurs locataires inquiets, ont forcé la porte du logement. À l’intérieur, ils ont découvert le corps sans vie de l’occupant, allongé dans son lit, en état de décomposition avancée.
Un environnement insalubre marqué par le syndrome de Diogène
Au-delà du drame humain, les secours ont mis au jour un cadre de vie insalubre extrême : sacs-poubelles entassés jusqu’au plafond, excréments d’animaux au sol, vaisselle moisie, objets cassés ou inutiles accumulés partout. L’homme vivait manifestement atteint du syndrome de Diogène, un trouble du comportement qui pousse les personnes à négliger totalement leur hygiène corporelle et domestique, tout en refusant toute aide extérieure.
Ce syndrome, souvent lié à un isolement social extrême ou à des troubles cognitifs comme la démence ou l’Alzheimer, entraîne une perte de repères, un rejet de toute norme de propreté, et un accumulation compulsive de déchets ou d’objets sans valeur. Dans certains cas, la cohabitation avec des animaux dans un tel environnement aggrave encore les conditions sanitaires.
L’inaction face au corps, faute de certificat de décès
Malgré la présence évidente d’un décès, les pompiers n’ont pas pu procéder à l’enlèvement immédiat du corps. Faute de certificat de décès, la police ne pouvait intervenir. « Aucun médecin ne voulait se déplacer. On nous disait que ce n’était pas possible, qu’il n’y avait pas de disponibilité », témoigne Rachid, époux de Samia. Les forces de l’ordre, quant à elles, se sont heurtées à des refus répétés de médecins réquisitionnés, tandis que la législation les empêchait de prendre d’autres initiatives sans validation d’un magistrat.
Cette immobilisation a duré plusieurs jours, pendant lesquels les effluves de décomposition ont envahi l’immeuble, provoquant nausées, vomissements et angoisse chez plusieurs locataires.
Une mobilisation judiciaire enfin obtenue
Ce n’est que grâce à une saisine d’urgence du juge de permanence que la situation a débloqué. Un médecin légiste a été dépêché sur place, permettant enfin la délivrance du certificat de décès et l’autorisation de transporter le corps.
Le bailleur social, alerté par les résidents, a promis une désinfection complète du logement avant toute future réaffectation. Une opération de nettoyage extrême devra être menée, nécessitant l’intervention de professionnels spécialisés dans la remise en état de logements insalubres.
Un drame silencieux qui interroge
Cet épisode met en lumière les conséquences humaines et sanitaires du syndrome de Diogène, encore trop souvent ignoré. Derrière les murs d’un appartement, un homme a vécu dans l’isolement, dans des conditions indignes, jusqu’à la mort, sans que personne ne parvienne à intervenir à temps. Les voisins, eux, restent traumatisés par l’expérience.
« Ce n’est pas seulement l’odeur ou la peur qui nous a marqués. C’est de se dire qu’on a tous vécu à côté de cet homme sans comprendre à quel point il allait mal », confie un autre résident.
Ce type de situation soulève des questions majeures sur la détection des personnes vulnérables, le rôle des services sociaux, et les limites administratives qui retardent parfois des interventions urgentes. La mairie, contactée, assure vouloir renforcer ses actions de repérage des cas à risque avec les bailleurs et les services de santé.
Qu’est-ce que le syndrome de Diogène ?
Le syndrome de Diogène est un trouble du comportement caractérisé par un abandon extrême de l’hygiène personnelle et domestique, une tendance à l’accumulation excessive (ou syllogomanie), et un refus systématique de l’aide extérieure. Ce trouble touche particulièrement les personnes âgées vivant seules, mais peut aussi concerner des individus plus jeunes, notamment en cas de troubles psychiatriques sous-jacents.
Il n’est pas toujours simple à repérer. Les personnes atteintes peuvent rester discrètes, recluses, ne recevant pas de visite. Les signes extérieurs se limitent souvent à des odeurs inhabituelles, des nuisances liées à des déchets visibles ou la présence d’animaux en surnombre.
En France, les situations de syndrome de Diogène sont de plus en plus signalées, en particulier par des bailleurs sociaux, des services d’hygiène, ou des voisins inquiets. La prise en charge passe par une approche pluridisciplinaire : intervention de travailleurs sociaux, soutien psychologique, nettoyage professionnel, et parfois hospitalisation psychiatrique.
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